FISC 2018 SP
Certains composants usinés industriels en acier
Énoncé des motifs

Ottawa, le 23 novembre 2018

Décision sur la portée – Certains composants usinés industriels en acier

Modules pour gaz naturel liquéfié, y compris modules de râteliers à tubes – Woodfibre LNG Limited

Le 23 novembre 2018, conformément au paragraphe 66(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, l’Agence des services frontaliers du Canada a rendu une décision sur la portée selon laquelle les composants usinés industriels en acier (CUIA) entrant dans les modules pour gaz naturel liquéfié, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre LNG Limited sont assujettis aux conclusions du Tribunal canadien commerce extérieur rendues le 25 mai 2017 dans l’enquête no NQ-2016-004, concernant le dumping de certains CUIA en provenance de la République populaire de Chine, de la République de Corée (à l’exception de ceux exportés par Hanmaek Heavy Industries Co., Ltd.) et du Royaume d’Espagne (à l’exception de ceux exportés par Cintasa, S.A.) et le subventionnement de CUIA en provenance de la Chine.

Ce document est disponible en format PDF (744 Ko) [aide sur les fichiers PDF]

Résumé

[1] Le 26 juin 2018, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a reçu, de Woodfibre LNG Limited (Woodfibre), une demande de décision sur la portée quant à l’assujettissement de ses modules pour gaz naturel liquéfié (GNL), y compris modules de râteliers à tubes, aux conclusions de dommage rendues par le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) le 25 mai 2017 dans l’enquête no NQ-2016-004.

[2] La demande de décision sur la portée était complète, et rien dans la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI) ne justifiait son rejet. Le demandeur a présenté des arguments et des éléments de preuve à l’appui de sa position selon laquelle ses modules pour GNL, y compris modules de râteliers à tubes, ne sont pas assujettis aux conclusions du TCCE.

[3] Le 26 juillet 2018, en vertu du paragraphe 63(8) de la LMSI, l’ASFC a ouvert une procédure sur la portée à l’égard des marchandises faisant l’objet de la demande.

[4] Le 3 août 2018, l’avocat représentant l’Institut canadien de la construction en acier (ICCA) a présenté un exposé demandant à l’ASFC de mettre fin à la procédure sur la portée en vertu du paragraphe 66(3) de la LMSI.

[5] En réponse, le 9 août 2018, l’avocat représentant le demandeur, Woodfibre, a présenté un exposé s’opposant à la demande de l’ICCA de mettre fin à la procédure. Des contre-exposés ont été présentés par les deux parties.

[6] L’ASFC a étudié les exposés des deux parties et a décidé de ne pas mettre fin à la procédure sur la portée. Ces exposées ainsi que la réponse de l’ASFC sont détaillées à l’annexe 1.

[7] Le dossier administratif de la procédure sur la portée a été clos le 19 septembre 2018.

[8] Le 15 octobre 2018, l’ASFC a diffusé la Déclaration des faits essentiels (DFE) qui contenait son évaluation préliminaire selon laquelle les CUIA entrant dans les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre sont assujettis aux conclusions du TCCE rendues le 25 mai 2017 dans l’enquête no NQ-2016-004.

[9] Le 22 octobre 2018, l’ASFC a reçu des observations sur la DFE de la part de l’ICCA et de Woodfibre. Le 29 octobre 2018, elle a reçu un contre-exposé de l’ICCA en réponse aux observations de Woodfibre sur la DFE.

[10] D’après l’information au dossier administratif, et compte tenu des facteurs pertinents prévus à l’article 54.6 du Règlement sur les mesures spéciales d’importation (RMSI) et de tout autre facteur pertinent prévu au paragraphe 66(6) de la LMSI, l’ASFC a rendu le 23 novembre 2018, en vertu du paragraphe 66(1) de la LMSI, une décision sur la portée selon laquelle les CUIA entrant dans les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre sont assujettis aux conclusions du TCCE rendues le 25 mai 2017 dans l’enquête no NQ-2016-004.

Description des marchandises faisant l'objet de la demande

[11] Les marchandises en question dans la procédure sur la portée sont des modules pour GNL, y compris modules de râteliers à tubes, aux fins du projet de GNL de Woodfibre. Le projet de GNL de Woodfibre constitue des installations de traitement et d’exportation de GNL qui reçoivent du gaz d’un pipeline de Fortis (Colombie-Britannique), éliminent les contaminants et réfrigèrent le gaz traité à -162 °C afin de produire du GNL pour exportation.

[12] Les unités qui forment les installations de GNL de Woodfibre sont regroupées en modules selon plusieurs facteurs, notamment le flux du processus, la fonction de l’équipement et les restrictions de transport en raison de la taille et du poids des modules. L’aménagement des installations qui en résulte, la distribution de l’équipement sur les modules et le nombre de modules sont optimisés pour réduire au minimum l’empreinte, le poids et le coût de ceux-ciNote de bas de page 1.

[13] Un système modularisé permet de réduire au minimum l’empreinte des installations par l’assemblage de tous les composants en une usine à plusieurs niveaux. L’acier de construction offre la charpente sur laquelle les composants sont disposés et interreliésNote de bas de page 2.

[14] Les modules sont construits dans un chantier de fabrication, dans l’ordre suivant : charpente d’acier structural, ajout de l’équipement, raccordement de l’équipement à la tuyauterie et installation de l’équipement électrique, instrumentation et câblage. Le raccordement de la tuyauterie, l’installation de l’équipement électrique et l’instrumentation des modules se font sur le chantier du projet. Chaque module est essentiellement une unité autonome, dont la fonctionnalité a été entièrement mise à l’essaiNote de bas de page 3.

[15] Un râtelier à tubes est une structure de charpente d’acier qui vient appuyer le fonctionnement d’une usine. Les modules de râteliers à tubes permettent de raccorder divers modules de traitement dans l’usine de production. Ils servent à transférer les matières, les produits, les fluides, les services publics, l’électricité et les données, entre l’usine de GNL, les aires de services publics, les torches et les installations d’entreposage/exportation. En plus de la tuyauterie intégrée, les râteliers à tubes comprennent des instruments connexes, des câbles d’alimentation et de l’équipement mécanique, comme des pompes et des vannes, raccordés à la tuyauterie. Les râteliers à tubes comportent aussi d’autres pièces d’équipement, comme les refroidisseurs d’air montés sur le dessusNote de bas de page 4.

[16] D’après les estimations de Woodfibre, les CUIA devraient compter pour environ 40 % du poids de ces modules pour GNL, y compris modules de râteliers à tubesNote de bas de page 5.

Les conclusions du TCCE

Contexte

[17] Le 12 septembre 2016, par suite d’une plainte déposée par Supermetal Structures Inc., Supreme Group LP et Waiward Steel LP, l’ASFC a ouvert des enquêtes sur le dumping de certains CUIA originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine), la République de Corée (Corée du Sud), le Royaume d’Espagne (Espagne), les Émirats arabes unis et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (Royaume-Uni) et le subventionnement de certains CUIA originaires ou exportés de la Chine. Le 25 avril 2017, l’ASFC a rendu des décisions définitives concernant le dumping de certains CUIA en provenance de la Chine, de la Corée du Sud et de l’Espagne et le subventionnement de certains CUIA en provenance de la Chine.

[18] Le 25 mai 2017, dans l’enquête no NQ-2016-004, le TCCE a jugé que le dumping de CUIA originaires ou exportés de la Chine, de la Corée du Sud (à l’exception de ceux exportés par Hanmaek Heavy Industries Co., Ltd.) et de l’Espagne (à l’exception de ceux exportés par Cintasa, S.A.) et le subventionnement de CUIA en provenance de la Chine ont causé un dommage à la branche de production nationale. Le TCCE a aussi exclu de ses conclusions les marchandises importées par Andritz Hydro Canada Inc. à Sinohydro au cours de l’année civile 2017 pour le projet hydroélectrique de Muskrat Falls dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador.

Description des marchandises en cause

[19] Aux fins de la présente procédure sur la portée, les marchandises faisant l’objet des conclusions du TCCE (les « marchandises en cause ») se définissent comme suit :

Certains éléments de la charpente de bâtiments, matériels d’exploitation, enceintes de confinement, structures d’accès, structures de traitement, et structures pour le transport et la manutention des matériaux, en acier ouvré de construction ou en grosse tôlerie, y compris les poutres d’acier, les colonnes, les pièces de contreventement, les charpentes, les garde-corps, les escaliers, les poutres continues, les galeries et les structures de châssis de transporteurs à courroie, les portiques, les silos, les goulottes, les trémies, les réseaux de gaines, les réservoirs de traitement, les râteliers à tubes et les distributeurs à lattes mécaniques, soit assemblés ou partiellement assemblés en modules, ou non assemblés, devant servir dans :

  1. l’extraction, le transport et le traitement du pétrole et du gaz;
  2. l’industrie minière (extraction, transport, stockage et traitement);
  3. les centrales électriques industrielles;
  4. les usines pétrochimiques;
  5. les cimenteries;
  6. les usines d’engrais;
  7. et les fonderies de métaux industriels;

Sont toutefois exclus des marchandises en cause : les pylônes électriques, les produits d’acier laminé non travaillés, les poutres d’acier non travaillées, les chevalets de pompage; les structures pour la production d’énergie solaire, éolienne et marémotrice, les centrales électriques dont la capacité nominale est inférieure à 100 MW, les marchandises classées comme « constructions préfabriquées » sous le code SH 9406.00.90.30, l’acier de construction utilisé dans des unités industrielles, mais autrement que des façons décrites ci-dessus; et les produits assujettis aux ordonnances ou aux conclusions dans Certaines pièces d’attache (RR-2014-001), Certains tubes structuraux (RR-2013-001), Certaines tôles d’acier laminées à chaud (III) (RR-2012-001), Certaines tôles d’acier au carbone (VII) (NQ-2013-005), et Certains caillebotis en acier (NQ-2010-002); originaires ou exportés de la République populaire de Chine, de la République de Corée (à l’exception de ceux exportés par Hanmaek Heavy Industries Co., Ltd.), et du Royaume d’Espagne (à l’exception de ceux exportés par Cintasa, S.A.).

[20] Pour de plus amples renseignements sur les marchandises en cause, veuillez consulter les Conclusions et motifs du TCCE dans l’enquête no NQ-2016-004 et l’Énoncé des motifs des décisions définitives de l’ASFC à l’égard de certains CUIA.

Processus lié à la procédure sur la portée

[21] Au début de la procédure sur la portée, un avis d’ouverture de la procédure sur la portée et des demandes de renseignements (DDR) ont été envoyés à toutes les parties intéressées connues et éventuelles. Les DDR visaient à obtenir les renseignements nécessaires pour la prise en compte des facteurs, tels qu’énoncés à l’article 54.6 du RMSI, et de tout autre facteur pertinent pour la procédure sur la portée. Le demandeur a également été invité à fournir des renseignements supplémentaires concernant la procédure sur la portée.

[22] Avant la date de clôture du dossier le 19 septembre 2018, l’ASFC a reçu des parties intéressées des observations selon lesquelles il devrait être mis fin à la procédure sur la portée. Elle a pris en compte les exposés des parties et décidé de ne pas mettre fin à la procédure sur la portée. Ces observations ainsi que la réponse de l’ASFC sont détaillées à l’annexe 1.

[23] Par suite de la publication de la Déclaration des faits essentiels, l’ASFC a reçu des parties intéressées diverses observations et divers contre-exposés. Elle a pris en compte les observations et les contre-exposés pour rendre sa décision sur la portée. Ces observations et contre-exposés ainsi que les réponses de l’ASFC sont détaillés à l’annexe 2.

Parties intéressées

Demandeur

[24] Le nom et l’adresse du demandeur sont les suivants :

Woodfibre LNG Limited
Bureau 1020, 1075, rue Georgia Ouest
Vancouver (Colombie-Britannique)
V6E 3C9

[25] Woodfibre, entreprise canadienne privée, compte importer des modules pour GNL, y compris des modules de râteliers à tubes, aux fins de son projet de GNLNote de bas de page 6.

[26] Une copie de la version non confidentielle de la demande de décision sur la portée présentée par Woodfibre se trouve dans la Liste de pièces justificatives de l’ASFC à l’adresse : http://www.cbsa-asfc.gc.ca/sima-lmsi/sp-pp/fisc2018/fisc2018-ex-fra.html.

Branche de production nationale

[27] Au début de la procédure sur la portée, l’ASFC a recensé 16 producteurs canadiens de marchandises similaires d’après l’information recueillie durant l’enquête initiale de 2016 sur les CUIA.

[28] L’ASFC a envoyé une demande de renseignements (DDR) à tous les producteurs de marchandises similaires. Elle a reçu des exposés de cinq producteurs canadiens de CUIA, soit Supermetal Structures Inc., Supreme Group LP, Waiward Steel LP, Ocean Steel & Construction Ltd. et MacDougall Steel Erectors Inc.

[29] L’ICCA a présenté une lettre énonçant sa position quant à l’assujettissement des marchandises en question aux conclusions du TCCE, ainsi que des renseignements et divers éléments de preuve documentaires à l’appuiNote de bas de page 7. L’ICCA est une association de l’industrie composée d’un large éventail d’intervenants dans l’industrie canadienne de la construction en acier. Ses membres comprennent des producteurs canadiens de CUIA.

Importateurs

[30] Au début de la procédure sur la portée, l’ASFC a recensé 85 importateurs connus et éventuels des marchandises en cause d’après l’information recueillie durant l’enquête initiale de 2016 sur les CUIA.

[31] L’ASFC a envoyé une DDR à tous les importateurs connus et éventuels des marchandises en cause. Elle a reçu des exposés de trois importateurs de CUIA, soit Husky Oil Operations Limited, Shell Canada Limited et Suncor Energy Inc.

[32] L’ASFC a aussi reçu un exposé de KBR Canada. Cependant, elle l’a reçu le 1er octobre 2018, soit après la date de clôture du dossier le 19 septembre 2018. KBR Canada n’a pas fourni de raison pour le retard dans la soumission de son exposé et il n’a donc pas été pris en compte dans la procédure sur la portée.

Exportateurs et/ou producteurs étrangers

[33] Au début de la procédure sur la portée, l’ASFC a recensé 80 exportateurs et/ou producteurs connus et éventuels des marchandises en cause d’après l’information recueillie durant l’enquête initiale de 2016 sur les CUIA.

[34] L’ASFC a envoyé une DDR à tous les exportateurs et/ou producteurs connus et éventuels. Elle a reçu un exposé de deux exportateurs/producteurs de CUIA, soit Shanghai Yanda Engineering Co., Ltd., établi en Chine, et Allerton Steel Ltd., établi au Royaume-Uni. Cependant, aucune observation n’a été fournie sur la question de savoir si les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, sont assujettis aux conclusions du TCCE.

Demandes de prorogation

[35] Plusieurs parties ont demandé une prorogation pour répondre à leur DDR respective. L’ASFC a examiné chaque demande; cependant, elle n’a acquiescé à aucune d’entre elles puisque les motifs évoqués ne constituaient pas des circonstances imprévues ou des fardeaux inhabituels. L’ASFC a informé les parties que les exposés reçus après la date d’échéance pour répondre à la DDR ne seraient pris en compte que si le temps et les ressources le permettaient. L’ASFC a pris en compte tous les exposés reçus avant la date de clôture du dossier aux fins de la décision sur la portée.

[36] Les arguments et les renseignements présentés par le demandeur et les autres parties sont détaillés ci-dessous.

Positions des parties

Parties soutenant que les marchandises en question ne sont pas assujetties aux conclusions du TCCE

[37] L’ASFC a reçu des réponses à sa DDR de parties intéressées soutenant que les marchandises en question ne sont pas assujetties aux conclusions du TCCE, soit Suncor Energy Inc. (« Suncor »), Husky Oil Operations Limited (« Husky ») et Shell Canada Limited (« Shell »).

[38] Les arguments et les renseignements présentés par chacune des parties intéressées sont détaillés dans la Déclaration des faits essentiels (DFE) diffusée le 15 octobre 2018. Ils sont résumés ci-dessous :

  • La définition des produits ne comprend pas les modules complexes
  • Les modules pour GNL complexes sont des produits manufacturés
  • Les modules pour GNL complexes ne sont pas des biens structuraux

La définition des produits ne comprend pas les modules complexes

[39] Les parties soutiennent que la définition des produits dans les conclusions du TCCE dans l’enquête no NQ-2016-004 vise des « modules simples » et non des « modules complexes ».

[40] En outre, les parties soutiennent que les modules complexes ne se limitent pas à un simple « assemblage » de CUIA. Les modules complexes « subissent des procédés de fabrication ou de production » pour devenir de nouveaux produits.

[41] Les parties soutiennent que les dessins fournis à l’ASFC montrent clairement la fonctionnalité des modules, qui nécessitent plus qu’un simple « assemblage » de CUIA.

Les modules pour GNL complexes sont des produits manufacturés

[42] Les parties soutiennent que l’assemblage de CUIA et d’éléments autres que des CUIA dans les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, constitue un procédé de fabrication qui transforme les CUIA en de nouveaux produits (c.-à-d. les CUIA seraient transformés en modules complexes).

[43] Les parties soutiennent que les modules complexes sont des produits manufacturés finis, semblables à des machines industrielles exerçant une fonction particulière, et qu’ils sont fonctionnels et mis à l’essai avant d’être exportés vers le Canada.

[44] Les parties ont pour position que les modules complexes ont une fonctionnalité propre au GNL qui définit le caractère des modules terminés et distincts.

Les modules pour GNL complexes ne sont pas des biens structuraux

[45] Les parties mentionnent que, dans l’appel no AP-99-063, le TCCE a fait la distinction entre « machines » et « structures » et a reconnu que ces dernières ne se rapportent pas « à de la machinerie ou à de l’équipement ».

[46] Les parties reconnaissent qu’un module simple construit à partir de CUIA répond à cette exigence « structurale », mais affirme qu’un module complexe n’y répond pas.

[47] Les parties soutiennent que les modules complexes sont des composants entièrement intégrés très techniques autres que des CUIA qui ont une fonctionnalité précise et qu’ils ne répondent pas à l’exigence pour être considérés comme des biens structuraux.

[48] Les parties soutiennent que les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre ont une fonctionnalité propre au GNL qui définit le caractère des modules terminés et distincts.

[49] Les parties affirment que les modules complexes sont définis par les éléments autres que des CUIA, qui représentent aussi la plus grande partie de leur valeur. Les parties contestent l’affirmation des producteurs canadiens que les CUIA demeurent des CUIA pendant tout le processus.

Parties soutenant que les marchandises en question sont assujetties aux conclusions du TCCE

[50] L’ASFC a reçu des réponses à sa DDR de parties intéressées soutenant que les marchandises en question sont assujetties aux conclusions du TCCE, soit Supermetal Structures Inc. (« Supermetal »), Supreme Group LP (« Supreme »), Waiward Steel LP (« Waiward »), Ocean Steel & Construction Ltd. (« Ocean ») et MacDougall Steel Erectors Inc. (« MacDougall »). Elle a aussi reçu un exposé en ce sens de l’Institut canadien de la construction en acier (ICCA).

[51] Les arguments et les renseignements présentés par chacune des parties intéressées sont détaillés dans la DFE. Ils sont résumés ci-dessous :

  • La définition des produits comprend les modules complexes
  • Les modules pour GNL complexes ne sont pas des produits manufacturés
  • Les éléments autres que des CUIA ne changent pas la fonction des CUIA

La définition des produits comprend les modules complexes

[52] Les parties soutiennent que la définition des produits dans les conclusions du TCCE dans l’enquête no NQ-2016-004 ne fait pas de distinction entre modules « simples » et modules « complexes ».

[53] Les parties soutiennent que la définition des produits comprend les CUIA, qu’ils soient « assemblés ou partiellement assemblés en modules, ou non assemblés ».

[54] Les parties soutiennent que les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre ne sont pas plus complexes que d’autres modules renfermant des CUIA qui sont produits par des producteurs canadiens pour des projets pétroliers et gaziers au Canada.

[55] En ce qui concerne les modules de râteliers à tubes, les parties font valoir que l’assemblage modulaire de type râteliers à tubes est expressément mentionné dans la définition des produits.

Les modules pour GNL complexes ne sont pas des produits manufacturés

[56] Les parties soutiennent que les modules complexes constituent une construction intermédiaire d’installations sous forme d’unités transportables et qu’ils sont assemblés au moyen de divers outils et machinerie des métiers de la construction.

[57] Les parties soutiennent que les modules complexes relèvent d’une catégorie d’assemblage qui découle de la planification et de la coordination réfléchies de travaux de construction d’installations de production en région éloignée. Les parties ajoutent que, pour accélérer la construction d’un projet, des éléments sont assemblés hors site et livrés au chantier du projet sous forme de pièces/composants/modules plus gros à réunir.

[58] Les parties soutiennent que l’assemblage modulaire représente l’achat d’un service de construction et non d’un produit. Le propriétaire du projet ou l’entreprise contractuelle d’ingénierie, d’approvisionnement et de construction (IAC) fournit gratuitement les matériaux, y compris les CUIA et les composants autres que des CUIA, au chantier modulaire; par conséquent, les marchandises lui appartiennent déjà.

[59] Les parties soutiennent qu’un module ne peut pas être qualifié de produit autonome distinct des pièces qui le composent. Elles ajoutent que différents codes et normes s’appliquent à différentes pièces d’un module et d’installations industrielles après la construction. Selon les exigences de la réglementation canadienne, les diverses pièces d’un module sont distinctes et séparées.

[60] Les parties soutiennent qu’un module ne peut pas être vendu séparément comme produit ayant une fonction autonome, et qu’il n’a pas de valeur marchande s’il n’est pas fixé à d’autres composants d’installations de traitement.

[61] Les parties soutiennent que l’affirmation qu’un module constitue un produit fini qui est manufacturé par le chantier modulaire ne cadre pas avec la façon dont les travaux sont garantis. En cas de problème lié aux CUIA, le propriétaire du projet ou l’entreprise d’IAC doit le régler avec le producteur des CUIA. En cas de problème lié à l’équipement, le propriétaire du projet ou l’entreprise d’IAC doit le régler avec le fabricant de l’équipement. Le propriétaire du projet ou l’entreprise d’IAC ne se rend pas au chantier modulaire pour corriger des défaillances dans les marchandises assemblées en modules, sauf si elles relèvent de la performance de ce chantier.

Les éléments autres que des CUIA ne changent pas la fonction des CUIA

[62] Les parties soutiennent que la construction de modules n’est ni un traitement ni un procédé de fabrication. Il s’agit plutôt de boulonner et/ou de souder les CUIA ensemble et de fixer les marchandises autres que des CUIA à la structure de CUIA. La fixation de marchandises autres que des CUIA à la structure de CUIA n’est pas un traitement ou un procédé de fabrication ou ne transforme pas les CUIA en d’autres produits.

[63] Les parties soutiennent que les CUIA utilisés dans des modules importés qui sont assemblés dans un autre pays sont les mêmes que ceux utilisés lorsque l’assemblage se fait sur un chantier modulaire près du chantier du projet au Canada.

[64] Les parties soutiennent que les CUIA assemblés en modules, y compris des modules complexes, demeurent des CUIA et conservent les caractéristiques qui leur sont propres. Les parties ajoutent que les CUIA assemblés en modules complexes demeurent facilement reconnaissables en exerçant leur fonction de structure et charpente de soutien pour les éléments autres que des CUIA.

[65] Les parties contestent l’affirmation de Woodfibre que les CUIA cessent d’être des CUIA lorsque la proportion d’éléments fixés autres que des CUIA atteint un certain niveau.

Analyse de l'ASFC

[66] Pour rendre une décision sur la portée en vertu du paragraphe 66(1) de la LMSI, l’ASFC doit tenir compte de tous facteurs réglementaires et de tout autre facteur considéré comme pertinent dans les circonstances selon le paragraphe 66(6) de la LMSI. Les facteurs prévus à l’article 54.6 du RMSI sont énumérés à l’annexe 3.

[67] Ainsi, l’ASFC a tenu compte des facteurs ci-dessous pour rendre sa décision sur la portée :

  • Les caractéristiques physiques des marchandises;
  • Leurs usages;
  • Leurs spécifications techniques;
  • Leurs circuits de distribution;
  • Les caractéristiques de la modularisation;
  • La description des marchandises dans les conclusions du TCCE;
  • Et les motifs des conclusions du TCCE.

[68] L’ASFC reconnaît que les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre sont des modules complexes puisqu’ils renferment à la fois des CUIA qui forment la charpente structurale et des éléments autres que des CUIA, comme l’équipement, les tuyaux, les instruments et les câbles, qui leur confèrent les propriétés fonctionnelles pour le GNL.

[69] Les modules complexes sont produits par l’assemblage de CUIA dans un module simple de charpente d’acier structural auquel des éléments autres que des CUIA sont ensuite raccordés ou fixés. Sur le plan des caractéristiques physiques, les CUIA contenus dans un module simple et un module complexe sont fondamentalement les mêmes. Ils sont produits à partir des mêmes matières premières, selon les mêmes normes techniques ou normes équivalentes pour le CanadaNote de bas de page 8. Les CUIA dans un module complexe ne sont pas transformés lorsque des éléments autres que des CUIA y sont raccordés puisqu’ils conservent leurs caractéristiques essentielles.

[70] Les CUIA offrent la charpente d’acier structural et le support auxquels sont fixés les éléments autres que des CUIA. D’après l’information au dossier administratif, l’ASFC croit comprendre que, pour les modules simples, tous les éléments autres que des CUIA sont raccordés sur le chantier du projet, tandis que, pour les modules complexes, la plupart de ces éléments sont raccordés sur le chantier de fabrication. En ce qui a trait aux usages, les CUIA dans un module simple et ceux dans un module complexe ont les mêmes usages dans un projet/des installations industriels, c’est-à-dire offrir la charpente d’acier structural. En d’autres mots, ils ont le même but qui consiste à offrir la charpente d’acier structural à laquelle les éléments autres que des CUIA sont raccordés.

[71] La description ci-dessous est donnée dans les Conclusions et motifs du TCCE :

« Les EAFI [CUIA] sont achetés dans le cadre d’un plus vaste effort d’obtenir et de construire un projet d’immobilisations. Ils peuvent également être achetés pour satisfaire aux besoins opérationnels courants (généralement en plus petites quantités). L’EAFI est un produit unique; il n’est pas vendu par l’intermédiaire de distributeurs ou de détaillants. L’acheteur d’EAFI peut être le propriétaire ou le développeur d’un projet. Le plus souvent, toutefois, les services d’une firme d’ingénierie seront retenus pour concevoir le produit, obtenir les marchandises et construire le produit. Ces firmes sont appelées des « IAC » (ingénierie, approvisionnement et construction).

Les EAFI sont généralement achetés en fonction du prix total, étant donné que l’acheteur achète un ensemble complet d’éléments ouvrés sur mesure, qui, ensemble, composent une structure sur mesure unique. Les EAFI sont expédiés non assemblés ou partiellement assemblés au chantier par l’usine qui les a fabriqués. Une fois qu’ils se trouvent sur le chantier, les éléments structurels sont disposés et assemblés par un monteur. Le monteur peut être une entreprise indépendante ou être lié à l’entreprise de fabrication. La livraison d’éléments individuels nécessite que l’entreprise de fabrication et le monteur se concertent. Les EAFI peuvent également être livrés à un chantier modulaire, où ils sont assemblés ou partiellement assemblés en modules puis expédiés au chantier de construction.

Les calendriers de livraison sur le chantier varient largement selon la taille et la complexité du projet. Commençant généralement 16 à 20 semaines après la date du contrat, la livraison peut s’étendre sur quelques mois, un an, deux ans, voire plus. Peu importe qu’il y ait ou non assemblage en modules, le fabricant produit les EAFI et les livre sur le chantier dans un ordre convenu d’avance pour que les travaux du monteur puissent avancer efficacementNote de bas de page 9. »

[72] D’après les Conclusions et motifs du TCCE, les CUIA, non assemblés ou en modules, sont obtenus et vendus dans les mêmes circuits de distribution et pourraient concerner une ou plusieurs parties, y compris des fabricants, des entreprises d’IAC, des chantiers modulaires et des monteurs.

[73] Les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre sont des modules complexes. Ils doivent être livrés au chantier du projet par le fabricant dans un ordre délibéré afin d’être raccordés/montés selon les devis d’ingénierie. Les projets de CUIA, qu’ils emploient une stratégie de modules « non assemblés », « simples » ou « complexes », font appel à une exécution planifiée et coordonnée sur une période donnée. Les diverses stratégies visent ultimement des installations de traitement industrielles de CUIA assemblés/raccordés.

[74] L’affirmation qu’un module constitue un produit fini autonome distinct des pièces qui le composent ne cadre pas avec la réalité des différents codes et normes s’appliquant à différentes pièces d’un module et d’installations industrielles après la construction. Selon les exigences de la réglementation canadienne, les diverses pièces d’un module sont distinctes et séparées.

[75] Même si Woodfibre affirme que chaque module est essentiellement une unité autonome dont la fonctionnalité a été entièrement mise à l’essai et qui s’apparente à une machine industrielle, les modules doivent toujours être raccordés sur le chantier du projet au moyen d’outils et de machinerie des métiers de la construction. L’intégration de modules complexes vise ultimement des installations de traitement industrielles de CUIA. Comme l’a expliqué Woodfibre dans sa demande, les unités de traitement qui forment des installations pour GNL peuvent être construites sur place, tous les matériaux étant alors livrés et réunis sur le chantier, ou elles peuvent être modularisées, l’usine étant alors construite surtout hors site à partir de modules distinctsNote de bas de page 10.

[76] La modularisation des CUIA avec des éléments autres que des CUIA peut se faire au Canada ou dans d’autres pays. Le fait qu’une proportion des activités de modularisation soit accomplie au Canada ou dans un autre pays ne change pas les caractéristiques essentielles des CUIA. Les CUIA offrent la charpente d’acier structural et le support auxquels sont fixés les éléments autres que des CUIA.

[77] Puisque les projets de CUIA sont sur mesure, un module produit pour un projet de CUIA donné ne peut pas être vendu séparément, même s’il a des fonctions autonomes. Tous les modules conçus pour un projet de CUIA précis doivent être réunis dans des installations de traitement industrielles de CUIA. Un module ne fonctionne de la manière conçue et prévue que s’il est intégré à l’ensemble des installations de traitement.

[78] L’affirmation que l’obtention de modules complexes s’apparente à l’achat de produits manufacturés ne cadre pas avec la façon dont la modularisation se fait réellement dans des projets industriels. D’habitude, le propriétaire du projet ou l’entreprise d’IAC participe intimement à tous les aspects du projet, de la conception à l’installation en passant par l’approvisionnement et la modularisation. Le propriétaire du projet ou l’entreprise d’IAC, à qui les marchandises appartiennent déjà, fournit gratuitement les matériaux, y compris les CUIA et les composants autres que des CUIA, au chantier modulaire pour assemblage/construction. C’est pourquoi l’ASFC considère que l’assemblage modulaire représente l’achat d’un service de construction; le propriétaire du projet ou l’entreprise d’IAC n’acquiert pas un produit manufacturé.

[79] Par ailleurs, l’affirmation qu’un module constitue un produit fini qui est manufacturé par un chantier modulaire ne cadre pas avec la façon dont les travaux sont garantis. En cas de problème lié aux CUIA ou à l’équipement ou de défaut dans la construction de modules, le propriétaire du projet de CUIA ou l’entreprise d’IAC doit le régler séparément avec le producteur des CUIA, le fabricant de l’équipement ou le chantier modulaire. De même, il doit s’adresser au chantier modulaire en cas de défaut dans le module. L’ASFC considère donc que l’assemblage modulaire représente l’exécution, par un chantier modulaire, d’un service de construction.

[80] Compte tenu de ce qui précède, l’ASFC considère les modules, simples et complexes, comme une construction intermédiaire d’installations de traitement. Bref, la modularisation peut être considérée comme étant la production d’installations de traitement sous forme d’unités transportables sur un chantier modulaire éloigné. Les modules finis sont transportés et raccordés à d’autres sur le chantier du projet.

[81] Enfin, l’ASFC souligne que, dans la définition des marchandises en cause dans les conclusions du TCCE, il est expressément fait mention de « modules » :

« certains éléments de la charpente… en acier ouvré de construction ou en grosse tôlerie… soit assemblés ou partiellement assemblés en modules, ou non assemblés, devant servir dans … »

[82] La définition des produits ne fait pas de distinction entre « modules simples » ou « modules complexes » et elle ne se limite pas à des « modules simples ».

Décision sur la portée

[83] Après avoir examiné l’information au dossier administratif et pris en compte les facteurs prévus à l’article 54.6 du RMSI ainsi que tout autre facteur pertinent, le 23 novembre 2018, l’ASFC a rendu une décision sur la portée en vertu du paragraphe 66(1) de la LMSI selon laquelle les CUIA entrant dans les modules pour GNL, y compris les modules de râteliers à tubes, de Woodfibre sont assujettis aux conclusions du TCCE rendues le 25 mai 2017 dans l’enquête no NQ-2016-004.

Mesures à venir

[84] Conformément au paragraphe 66(4) de la LMSI, la présente décision sur la portée entre en vigueur le 23 novembre 2018.

[85] Conformément à l’article 69 de la LMSI, la présente décision sur la portée est contraignante à l’égard des révisions et réexamens faits concernant des marchandises objet de la décision qui sont dédouanées à la date à laquelle celle-ci prend effet ou après cette date.

[86] Conformément au paragraphe 66(7) de la LMSI, la décision sur la portée visée au paragraphe 66(1) est définitive, sauf recours prévu au paragraphe 61(1.1). En vertu de cette dernière disposition, la personne intéressée, selon la définition prévue au paragraphe 52.3(1) du RMSI, peut interjeter appel de la décision sur la portée devant le TCCE. L’avis d’appel doit être déposé par écrit auprès de l’ASFC et du TCCE dans les 90 jours suivant la date de la décision. La décision du TCCE peut faire l’objet d’un appel devant la Cour d’appel fédérale.

Renseignements

[87] Le présent Énoncé des motifs est publié sur le site Web de l’ASFC à l’adresse ci-dessous. Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec les agents dont le nom figure ci-après :

Renseignements

Adresse :

Centre de dépôt et de communication des documents de la LMSI
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Agence des services frontaliers du Canada
100, rue Metcalfe, 11e étage
Ottawa (Ontario)  K1A 0L8
Canada

Téléphone :
  • Ansa Mohammad : 613-960-6096
Courriel :

simaregistry-depotlmsi@cbsa-asfc.gc.ca

Site web :

www.cbsa-asfc.gc.ca/sima-lmsi/

Le directeur des Enquêtes en dumping et en subventionnement
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Darryl Larson

Annexe 1 - Observations

Fin de la procédure sur la portée

Exposé de l’ICCA

Le 3 août 2018, l’avocat représentant l’ICCA a présenté un exposé demandant à l’ASFC de mettre fin à la procédure sur la portée puisque la question à l’étude fait actuellement l’objet d’une demande de contrôle judiciaire déposée par LNG Canada Limited (« LNG Canada ») devant la Cour d’appel fédérale (CAF).

L’avocat soutient que la demande de Woodfibre vise à obtenir la même réparation que celle demandée par LNG Canada auprès de la CAF, soit une affirmation que les CUIA contenus dans les modules complexes ne sont pas assujettis aux conclusions du TCCE dans l’enquête no NQ-2016-004.

L’avocat mentionne que le paragraphe 66(3) de la LMSI et l’alinéa 54.5d) du RMSI prévoient que le président peut mettre fin à une enquête si les circonstances visées aux alinéas 54.3b) à d) du Règlement se présentent après l’ouverture d’une procédure sur la portée – notamment si le fondement de la demande de décision sur la portée fait l’objet d’une procédure devant la CAF.

Contre-exposé du demandeur

Le 9 août 2018, l’avocat représentant le demandeur, Woodfibre, a présenté un exposé s’opposant à la demande de l’ICCA et faisant valoir qu’il n’y a pas de conflit entre la procédure sur la portée et le contrôle judiciaire. L’avocat soutient que le fondement de la procédure sur la portée est l’assujettissement des marchandises faisant l’objet de la demande de décision aux conclusions du TCCE dans l’enquête no NQ-2016-004, tandis que celui du contrôle judiciaire devant la CAF concerne le manque de clarté de la définition des produits et l’obligation du TCCE de clarifier la portée de la définition en ce qui a trait, de façon générale, au terme module.

L’avocat mentionne que Woodfibre n’a participé ni à la demande de contrôle judiciaire des conclusions du TCCE déposée par LNG Canada devant la CAF ni aux audiences sur le dommage du TCCE.

Contre-exposé de l’ICCA

Le 10 août 2018, l’avocat de l’ICCA a présenté un exposé en réponse à la contestation de Woobfibre dans lequel il soutient que le contrôle judiciaire devant la CAF vise à obtenir des conclusions sur l’assujettissement des marchandises. L’avocat soutient que la procédure devant la CAF consiste à déterminer si le TCCE a fait une erreur en ne tranchant pas sur l’assujettissement des CUIA contenus dans des modules complexes et, le cas échéant, si la CAF doit conclure que ces CUIA ne sont pas des marchandises en cause ou encore renvoyer la question au TCCE pour qu’elle rende une décision en ce sens.

Exposés supplémentaires du demandeur et de l’ICCA

Le 14 août 2018, l’avocat de Woodfibre a présenté un exposé en réponse au contre-exposé de l’ICCA du 10 août 2018. En règle générale, l’avocat a répété les mêmes arguments et a demandé qu’il ne soit pas mis fin à la procédure sur la portée.

Le 14 août 2018, l’avocat de l’ICCA a présenté un contre-exposé répétant les mêmes arguments et demandant que l’ASFC mette fin à la procédure sur la portée en attendant le règlement de la question devant la CAF.

Réponse de l’ASFC

L’ASFC a étudié les exposés des deux parties et a décidé de ne pas mettre fin à la procédure sur la portée. L’ASFC est d’avis que la question devant la CAF diffère de celle dans la demande de décision sur la portée faite par Woodfibre. Par ailleurs, en vertu du paragraphe 67(1) de la LMSI, l’ASFC doit réviser une décision sur la portée pour donner effet à une décision du TCCE, de la CAF ou de la Cour suprême du Canada.

Annexe 2 - Observations sur la DFE

Information prise en compte pour rendre la décision provisoire

Observations

L’avocat de l’ICCA mentionne que, pour l’évaluation préliminaire de l’assujettissement des marchandises en question aux conclusions du TCCE, l’approche employée par l’ASFC est conforme à la LMSI et au RMSI.

L’avocat de Woodfibre soutient que les facteurs approfondis par l’ASFC pour établir que les modules complexes ne constituent pas des produits manufacturés ne sont pas pertinents, en particulier que les modules complexes doivent être utilisés avec d’autres produits et qu’ils sont construits sur mesure pour un projet précis.

L’avocat de Woodfibre mentionne également que la DFE contient des faits non pertinents qu’il ne faudrait pas retenir, en particulier l’affirmation des producteurs canadiens qu’ils ont la capacité de produire des modules aussi complexes que les modules pour GNL de Woodfibre, car elle confond la question et celle faisant l’objet du processus d’exclusion du TCCE.

Contre-exposé

L’avocat de l’ICCA fait valoir que Woodfibre ne s’est pas opposé aux conclusions suivantes dans la DFE :

  • « Les modules complexes sont produits par l’assemblage de CUIA dans un module simple de charpente d’acier structural auquel des éléments autres que des CUIA sont ensuite raccordés ou fixés. »
  • « Sur le plan des caractéristiques physiques, les CUIA contenus dans un module simple et un module complexe sont fondamentalement les mêmes. »
  • « En ce qui a trait aux usages, les CUIA dans un module simple et ceux contenus dans un module complexe ont les mêmes usages dans un projet/des installations industriels, c’est-à-dire offrir la charpente d’acier structural. En d’autres mots, ils ont le même but qui consiste à offrir la charpente d’acier structural à laquelle les éléments autres que des CUIA sont raccordés. »

Réponse de l’ASFC

Dans son analyse préliminaire, et aux fins de la décision sur la portée, l’ASFC a tenu compte de l’information au dossier administratif, des facteurs prévus à l’article 54.6 du RMSI ainsi que de tout autre facteur pertinent. L’analyse de l’ASFC et la prise en compte de ces facteurs sont détaillées à la section « Analyse de l’ASFC » du présent Énoncé des motifs.

Approche employée pour l’évaluation préliminaire

Observations

L’avocat de Woodfibre maintient sa position selon laquelle les CUIA dans des modules complexes ne sont plus des CUIA puisqu’ils y ont été intégrés de manière irrévocable. Il n’est plus possible sur le plan pratique de retirer les CUIA des modules pour les utiliser à d’autres fins. Il est aussi quasi impossible d’extraire de CUIA des éléments autres que des CUIA. C’est pourquoi l’avocat soutient que les CUIA cessent d’être des CUIA.

L’avocat de Woodfibre soutient que l’ASFC a inversé la question. Il ne s’agit pas de commencer par la définition des produits pour voir si le caractère des CUIA a changé, mais plutôt de commencer par l’article importé pour se demander s’il possède le caractère essentiel des marchandises assujetties aux conclusions du TCCE. L’avocat ajoute que le caractère essentiel de ce qui est importé correspond à celui d’une « machine industrielle », laquelle n’est pas assujettie aux conclusions du TCCE.

L’avocat de Woodfibre renvoie à la décision dans Caillebotis en acier (RR-2015-001) dans laquelle le TCCE a jugé que les caillebotis en acier ne correspondent plus à la définition des marchandises en cause lorsqu’ils sont intégrés à une structure industrielle complexe. L’ASFC a tenu compte de cette décision dans l’appel en matière de subjectivité no SG-1, du 21 juillet 2017, dans laquelle elle a déterminé que les caillebotis en acier usinés constituent des marchandises en cause même s’ils sont importés pour être utilisés dans des structures d’acier les accompagnant, puisqu’à l’importation, ils se trouvent dans leurs propres conteneurs et ne sont pas fixés ou joints, notamment par ouvraison, à une structure. L’avocat de Woodfibre soutient que la situation est exactement le contraire de celle dans le cas qui nous intéresse. Les CUIA sont entièrement intégrés à un article plus gros, qui est importé en tant que tel, sous un code tarifaire unique et à une seule fin.

Contre-exposé

L’avocat de l’ICCA mentionne que, même s’il n’est pas aussi simple de retirer des éléments autres que des CUIA que de démonter une tente, cela n’est pas « quasi impossible » et peut se faire sans détruire les CUIA ou éléments autres que des CUIA. L’avocat soutient que le fait qu’une soudure puisse devoir être coupée avec un chalumeau ou une scie ne signifie pas que l’assemblage de CUIA en modules fait en sorte que les « CUIA cessent d’être des CUIA », comme le prétend Woodfibre. L’avocat ajoute que le fait qu’il ne soit pas raisonnable sur le plan commercial de retirer des CUIA d’un module n’est pas pertinent, puisque les CUIA, de par leur nature même, sont faits sur mesure pour un projet précis.

L’avocat de l’ICCA mentionne que l’ASFC a posé la question formulée par Woodfibre dans sa lettre de présentation et demande de décision sur la portée, et y a répondu :

  • « La présente demande vise à déterminer si les modules pour GNL que doit importer Woodfibre LNG, ou tout composant de ceux-ci, constituent des marchandises en cause visées par l’enquête sur les CUIA de 2016. »
  • « Il s’agit de déterminer si les mesures prises pour modulariser les CUIA sont suffisamment radicales pour faire en sorte que les CUIA contenus dans des modules complexes ne constituent plus un simple assemblage, mais plutôt autre chose. »

L’avocat de l’ICCA mentionne que rien dans la LMSI, la common law ou les accords de l’Organisation mondiale du commerce n’exige que la définition de produits dans un recours commercial se conforme au système établi de classement des marchandises selon le Tarif des douanes et les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé. Par ailleurs, rien n’empêche qu’un recours commercial s’applique à un bien intégré à un autre.

L’avocat de l’ICCA mentionne que des recours commerciaux dans d’autres pays s’appliquent à des biens intégrés à d’autres. Par exemple, l’Union européenne et les États-Unis ont pris des recours commerciaux contre le biodiesel, notamment celui contenu dans un mélange de produits pétrochimiques et de biodiesel. Par ailleurs, les recours commerciaux américains contre les extrusions d’aluminium s’appliquent aux extrusions dans des modules de murs-rideaux.

L’avocat de l’ICCA soutient que l’affaire Caillebotis en acier n’étaye pas la thèse qu’un produit de l’acier intégré à une structure perd son identité; elle étaye plutôt la thèse qu’un produit de l’acier intégré à une structure peut perdre son identité à un moment donné, et que cette détermination est du ressort de l’ASFC plutôt que du Tribunal. De plus, l’avocat de l’ICCA soutient que le fait que l’ASFC ait jugé que les caillebotis entrent dans la portée des conclusions dans l’affaire Caillebotis en acier, partiellement parce que non fixés, n’étaye pas la thèse que tout produit assujetti à des conclusions du TCCE sort nécessairement de la portée de celles-ci parce que fixé à des marchandises non en cause à l’importation.

Réponse de l’ASFC

L’ASFC soutient que le Tarif des douanes et les principes énoncés dans les Règles générales d’interprétation ne sont pas déterminants pour la question de savoir si les marchandises correspondent ou non aux marchandises en cause.

L’ASFC souligne que, dans la définition des marchandises en cause dans les conclusions du TCCE, il est expressément fait mention de « modules » :

« certains éléments de la charpente… en acier ouvré de construction ou en grosse tôlerie… soit assemblés ou partiellement assemblés en modules, ou non assemblés, devant servir dans … »

Interprétation du terme « module »

Observations

L’avocat de Woodfibre s’oppose à l’interprétation faite par l’ASFC dans la DFE du terme « module » comme se rapportant à tous les modules, y compris les modules simples et complexes, parce que les « modules » sont mentionnés dans la définition des produits. L’avocat de Woodfibre mentionne que, le terme « module » étant vague et non défini, il doit être interprété dans le contexte des recours commerciaux et de la législation sur les douanes du Canada dans lequel il est employé. L’avocat de Woodfibre soutient que le terme « module » doit s’entendre de modules découlant, dans leur essence, de CUIA.

L’avocat de Woodfibre fait valoir qu’une telle interprétation rendrait de nombreux importateurs non conformes à la législation en matière de recours commerciaux, tels les importateurs de boissons gazeuses contenant du sucre raffiné ou les importateurs de meubles contenant des pièces d’attache, puisque le sucre raffiné et les pièces d’attache sont des marchandises assujetties à des droits de la LMSI.

L’avocat de Woodfibre demande à l’ASFC de fournir des directives en matière d’observation et des procédures d’importation pour les modules complexes.

Contre-exposé

L’avocat de l’ICCA mentionne que Woodfibre a omis d’expliquer comment et pourquoi il ne convient pas d’interpréter les modules comme incluant les modules « simples » et « complexes ». L’avocat de l’ICCA soutient que la conclusion à laquelle est parvenue l’ASFC dans la DFE, selon laquelle les « modules » incluent tous les types de modules, est exacte.

L’avocat de l’ICCA mentionne que l’application des conclusions du TCCE aux CUIA dans un module n’entraînera pas le « chaos réglementaire », comme le prétend Woodfibre. L’application de chaque définition de produits découlant d’un recours commercial en vertu de la LMSI dépend des termes employés. Dans ce cas, les conclusions incluent expressément les CUIA dans des modules. Dans le cas du sucre raffiné, une boisson gazeuse est un produit fini, et il est supposé que le sucre raffiné est transformé; de plus, la définition des produits ne se rapporte pas expressément au sucre raffiné dans les boissons gazeuses.

Réponse de l’ASFC

La section du présent Énoncé des motifs intitulée « Analyse de l’ASFC » détaille le travail d’analyse de cette dernière, y compris son interprétation du terme « module ».

Les exportateurs qui ont coopéré à l’enquête initiale sur les CUIA de 2016 ont reçu des directives sur la façon d’obtenir des valeurs normales et des prix à l’exportation pour chaque expédition de CUIA exportée au Canada.

Les importateurs sont priés de consulter l’Unité de l’observation de la LMSI pour se renseigner sur la responsabilité à l’égard des droits potentiels de la LMSI et la façon de déclarer en détail les marchandises assujetties à la LMSI.

Exposé présenté à la date de clôture du dossier

Observations

L’avocat de Woodfibre demande à l’ASFC de radier du dossier l’exposé de l’ICCA parce que présenté le jour où le dossier a clos. L’avocat soutient que l’exposé était une réponse déguisée à la DDR et qu’il n’a pas permis au demandeur d’examiner ou de commenter les allégations et les faits présentés par l’ICCA.

Contre-exposé

L’avocat de l’ICCA mentionne que Woodfibre et l’ICCA ont eu la même possibilité de présenter des documents que chacun jugeait pertinents. L’avocat de l’ICCA soutient que les parties ont l’habitude de présenter des renseignements peu de temps avant la date de clôture du dossier, et qu’il n’y a rien d’intrinsèquement « inéquitable » dans ce processus.

L’avocat mentionne que les parties ont eu l’occasion de présenter des exposés et de formuler des observations au sujet de tout document versé au dossier. L’occasion de « formuler des observations » au dossier est prévue à l’étape « Observations sur la DFE », et l’avocat souligne que Woodfibre n’a pas fourni d’observations sur la DFE au sujet de l’exposé de l’ICCA à la date de clôture du dossier.

Réponse de l’ASFC

L’ASFC tâche de prendre en compte tous les renseignements reçus avant la date de clôture du dossier, lorsque le temps et les ressources le permettent. Dans ce cas, l’ICCA a présenté une réponse à la DDR et l’ASFC a pu la prendre en compte. L’ASFC a aussi pu prendre en compte le contre-exposé de Woodfibre sur les réponses à la DDR, qui a été présenté à la date de clôture du dossier.

Toutes les parties intéressées ont l’occasion de commenter la DFE, y compris l’information sur laquelle l’ASFC s’est appuyée dans son évaluation préliminaire.

Annexe 3 - Facteurs prévus dans le RMSI

L’article 54.6 du RMSI prévoit ce qui suit :

54.6 Pour l’application du paragraphe 66(6) de la Loi, le président tient compte des facteurs ci-après pour rendre la décision sur la portée :

  1. dans tous les cas :
    1. les caractéristiques physiques des marchandises à l’égard desquelles la procédure sur la portée a été engagée, notamment leur composition,
    2. leurs spécifications techniques,
    3. leurs usages,
    4. leur emballage – y compris toutes autres marchandises contenues dans l’emballage – ainsi que le matériel promotionnel et la documentation liés aux marchandises à l’égard desquelles la procédure sur la portée a été engagée,
    5. leurs circuits de distribution;
  2. dans le cas d’une décision visant à déterminer la question de savoir si des marchandises à l’égard desquelles la procédure sur la portée a été engagée sont de même description que des marchandises auxquelles un décret du gouverneur en conseil ou une ordonnance ou des conclusions du Tribunal s’appliquent :
    1. la description des marchandises visée par le décret, l’ordonnance ou les conclusions,
    2. dans le cas d’une ordonnance ou de conclusions du Tribunal, les motifs,
    3. toute décision pertinente rendue par le Tribunal, la Cour d’appel fédérale, la Cour suprême du Canada ou un groupe spécial sous le régime des parties I.1 ou II de la Loi;
  3. dans le cas d’une décision visant à déterminer la question de savoir si des marchandises à l’égard desquelles la procédure sur la portée a été engagée sont de même description que des marchandises auxquelles un engagement s’applique :
    1. la description des marchandises visée dans la décision provisoire de dumping ou de subventionnement et dans l’engagement,
    2. les motifs de la décision provisoire;
  4. dans le cas où la décision visée aux alinéas b) ou c) vise à déterminer la question de savoir si des marchandises à l’égard desquelles la procédure sur la portée a été engagée sont originaires d’un pays visé par le décret, l’ordonnance, les conclusions ou l’engagement applicables ou sont originaires d’un pays tiers :
    1. les activités de production effectuées dans le pays tiers à l’égard de ces marchandises et dans le pays visé à l’égard des marchandises à partir desquelles elles sont produites,
    2. la nature de ces marchandises au moment où elles ont été exportées du pays tiers et des marchandises à partir desquelles elles sont produites au moment où elles ont été exportées du pays visé,
    3. les coûts de production des marchandises engagés dans le pays tiers.
Date de modification :